« la photographie est un message philanthropique dont les signes doivent émouvoir avec tempérance, évoquer avec discrétion, exprimer sans insistance« Werner Bishop
Musique: Art Pepper, « The Prisoner«
La photo du mois de Mai, le joli mois de mai, tarde à venir, c’est dire qu’il a été plutôt chargé pour moi, notamment en photographie.
Nous assistons actuellement à Marseille et dans la région, Arles à part, à une effervescence dans ce domaine que je n’avais pas saisie lors des précédentes années. Je ne pourrais dire si c’est un effet de mode ou si petit à petit, elle (la photo) s’est insinuée dans le paysage artistique, s’est affirmée, confirmée, désinhibée, bref émancipée.
C’est aussi le grand retour de l’argentique (« foto film ») et de procédés anciens, l’esprit « vintage » s’est emparé de la photo, nous ne pouvons que nous en réjouir!
C’est le moment de revenir à nos classiques comme on relit du Victor Hugo, du Balzac ou du Rimbaud! S’intéresser à l’état d’esprit qui animait une certaine école de la photographie: celle des Humanistes que l’on range souvent de manière empirique, chez les « street photographers ». Terme anglais pour terme anglais, je préfère celui de « committed photographers », que l’on pourrait traduire par photographes engagés moins réduit, me semble t-il, dans leur champ d’action que photographes de rue.
Lewis Hine pour sa part disait « peu de technique et beaucoup de coeur ». HCB lui avait une technique magistrale et un grand sens de la composition. Il y adjoint également l’alignement de l’œil et du cœur. Quant à Doisneau, Ronis, Boubat, Izis et tant d’autres, c’est leur attachement aux valeurs humaines que ce soit sur la vie quotidienne ou sur des vies extraordinaires qui enflammaient leurs œuvres.
Ils s’acoquinaient avec des poètes car ils étaient un peu leurs frères d’armes. A leur propos, on parle d’ailleurs de « réalisme poétique ». Leurs photos sont habitées par l’âme des gens et des choses qu’ils photographiaient et aujourd’hui encore et plus que jamais, elles nous parlent, éveillent en nous des choses, nous émeuvent. On y perçoit la vie dans son mouvement entier car contrairement à ce que les gens pensent, la photo ne fige pas la vie, elle doit la sublimer, la prolonger, la suspendre! Capter l’essence, l’universel pour l’immortaliser!
Était ce dû au procédé argentique qui nécessitait une chimie, voire une alchimie extrêmement subtile entre les photographes eux mêmes et leurs sujets? N’est ce pas « ça » en réalité « L’instant décisif » dont parle HCB, ce moment où tout se combine pour offrir à la postérité cet instant d’éternité!
Il me semble que c’est un peu ce qui manque dans certaines galeries de photos numériques que je parcoure. De la technique certes, mais peu d’âme…